L’extrait du mois – septembre 2017

La matière noire du cerveau.

Cet extrait est tiré de l’interview du professeur Pierre-Marie Lledo, auteur du livre « Le Cerveau, la machine et l’humain », qui vient de paraître aux Editions Odile Jacob (L’Obs n° 2746 du 22 juin 2017). Il introduit les prochains articles à paraître.

Freud se serait sans nul doute passionné pour ces engins qui offrent aux chercheurs le privilège fou de visionner les processus mentaux de leurs cobayes désormais jusque dans leurs synapses, ces liens entre neurones qui ne dépassent pas le millième de millimètre. D’autant qu’ils viennent apporter la confirmation à certaines de ses théories. « Dans les enregistrements, l’activité spontanée de l’esprit passait par une sorte de bruit ambiant. Nous avions cette idée que la pensée s’enclenchait seulement lorsqu’on la stimulait. Comme un processeur activé lorsqu’il reçoit des informations. Or, nous avons mesuré qu’à elle seule celle-ci consomme une très large quantité de l’énergie du cerveau. Jamais nous ne l’aurions imaginé ! C’est dire la part qu’occupe cette partie immergée de la conscience, que l’on pourrait appeler sa matière noire, comme en astrophysique ». Autre révélation renversante, avant même qu’une pensée affleure à notre conscience, celle-ci est déjà déterminée à notre insu par notre cerveau, comme en témoigne l’expérience menée par l’équipe de John-Dylan Haynes à l’Institut Max Plank. Les sujets devaient actionner, au gré de leur fantaisie, deux interrupteurs respectivement placés dans chacune de leur main. Or, l’activité neuronale révélait leur choix parfois dix secondes avant qu’eux-mêmes ne le sachent. « Cela nous invite nécessairement à reconsidérer la notion de libre arbitre », constate Pierre-Marie Lledo. Les experts de la cognition ont également mis en évidence le refoulement et son rôle fondamental dans l’apprentissage de la connaissance. Nous sommes pourvus d’automatismes cérébraux communs aux animaux pour évaluer, par exemple, une distance ou une quantité d’objets. Nous devons d’abord inhiber ces « réflexes » inscrits dans nos gènes avant de former un raisonnement ou d’aller contre l’évidence des sens.

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